C’était la semaine du crush. Elle a commencé avec mon crush de Monoprix, que j’ai croisé lundi en allant prendre le métro. Elle a continué avec mes crushs de bureau, que j’ai entraperçu ici et là. Une coplègue (copine-collègue) a fini la semaine en allant boire un verre avec son maxi-crush. Le thème me semblait donc idéal, pour cette seconde newsletter.
Je suis une femme à crushs. Il y a des femmes qui enchaînent les chopes, d’autres qui vivent des relations longues. Et puis il y a aussi des personnes, comme moi, qui accumulent les crushs.
Pour ceux du fond, qui ne sauraient pas ce qu’est un crush, ça n’a rien à voir avec Candy Crush. Aucun bonbon à dégommer, aucun niveau à dépasser. Le crush, c’est cette personne qui te donne des papillons dans le ventre et qui fait battre ton coeur plus vite, un coup de coeur plus ou moins intense. Quand j’ai un crush, c’est souvent pour un garçon mignon à qui j’ai envie de sourire. Devant lequel je vais instinctivement remettre une mèche de cheveux derrière mon oreille et ricaner, car au fond de moi, je vis dans une comédie romantique (et ça ne change pas).
Depuis aussi longtemps que je me souvienne, j’ai toujours eu des crushs. Au collège, chaque année, il y en avait un nouveau. A ce moment-là, je tentais presque systématiquement le coup avec eux. Je me rapprochais, on devenait copain et un jour, je disais à mon crush que je l’aimais bien, que je voulais sortir avec lui. J’étais un peu une experte de cette technique : ultra timide au quotidien, mais très directe par SMS. Bon, ça ne marchait jamais. Mais je gardais la face ! Et tu sais pourquoi ? Je te le donne dans le mile : j’avais systématiquement (ou presque) un crush de rechange. Un autre garçon mignon que je trouvais sympa, avec lequel j’avais envie de vivre une histoire (ado, je voulais vivre une histoire, coûte que coûte).
Quand je suis arrivée au lycée, c’était le festival. L’amphithéâtre du crush. Tous les garçons me semblaient mignons. Quel choix incroyable ! J’avais noté le nom et prénom de tous ceux de ma classe que j’aimais bien (à savoir : que je trouvais physiquement attrayant) pour les chercher sur Facebook. En seconde, dans ma classe, je devais avoir 4 ou 5 crushs. Certains ont duré une semaine, quand d’autres ont continué de faire battre mon coeur un peu plus fort, des années et des années plus tard.
La folie du crush ne s’est pas arrêtée avec la fin du lycée, puisqu’à la fac, c’était la même rengaine : un établissement immense, des garçons mignons, beaucoup beaucoup de garçons mignons. Et le coeur qui chavire encore et encore. L’envie de remettre cette mèche derrière l’oreille (fichues comédies romantiques).
Depuis que j’ai sauté à pieds joints dans la vie de célibataire, je me suis remise à collectionner les crushs comme les cartes Pokémon. Ils ont tous leurs particularités, un métier différent, un lieu d’habitation plus ou moins éloigné du mien. Je ne sais pas si cette collection est due à mon gros coeur, mes goûts très variés ou si, simplement, l’époque veut ça. Certains sont éphémères, ils apparaissent une fois la nuit tombée et sont oubliés dès le lever du soleil, quand d’autres durent. Les papillons restent au fond de l’estomac et attendent sagement de s’envoler.
Malgré la multitude de rencontres, sur les appli, dans les soirées, au bureau, à droite, à gauche, je reste fidèle à mes crushs. Il y a celui du Monoprix, un look de bad boy qui bosse à La Défense, que je croise une fois par mois. Mon voisin du cinquième, la trentaine, un physique d’école de commerce avec un sourire ravageur. Je l’entends jouer aux jeux vidéos le mardi soir, mais je ne peux pas m’empêcher de vouloir l’inviter à boire un verre à chaque fois que je le croise (sauf que je suis incapable de le tutoyer et de lui dire une phrase cohérente). Le mec de la machine à café, que je regarde du coin de l’œil. Celui de cette boîte de nuit, qui doit m’écrire quand il est de retour à Paris. Celui de la fac que j’ai toujours espoir de recroiser quelque part dans Paris. Celui du lycée. Le mec de Tinder, celui de Bumble, ce pote de pote, et peut être même celui qui m’a ghosté (un ancien crush reste-t-il un crush malgré tout ?).
Te voilà donc à lever les yeux au ciel en te disant « wow cette fille est vraiment désespérée/timbrée ». Mais non, loin de là. C’est toute la magie du crush : il n’existe pas forcément pour donner lieu à une histoire.
Le crush, c’est le pincement au cœur quand tu le croises par hasard, l’envie un peu, le désir quelque fois. Il est la personne à laquelle penser, après une longue journée de travail et avant de s’endormir. Il peut être fantasme, il peut prendre beaucoup de place mentale, mais il peut aussi exister seulement pour faire plaisir à l’imagination.
Toutes mes copines ont des crushs. Ça ne veut pas dire qu’elles veulent couler le parfait amour, se marier avec cette personne et faire suffisamment de marmots pour donner lieu à une équipe de foot. C’est simplement une façon de s’évader. Mais pourquoi a-t-on des crush ?
Je me suis sincèrement posée la question. Alors j’ai fait deux-trois recherches, histoire de mêler l'utile à l’agréable. Il y a deux ans, le HuffingtonPost publiait « Ce que le mot "crush" nous apprend de l'amour en 2020 ». Je te partage un extrait dans lequel je me suis retrouvée.
Pour Lucile Bellan, journaliste et autrice du livre: “Aimer c’est compliqué”, le crush, c’est une définition moderne de l’amour à sens unique.
L’écrivaine explique que cette relation implique autant d’inconvénients que d’avantages: “un crush c’est un coup de cœur, mais c’est aussi le bruit du cœur qui s’émiette. Il est rare que le crush devienne une véritable histoire, tout au mieux un sex-friend.”
Pour Lucile Bellan, il y a une raison simple à cela: “la plus belle histoire que l’on écrit avec le crush, on l’écrit avec soi-même. On l’imagine en train de passer devant nous à la pause déjeuner, on rougit quand il ou elle se retrouve à la même soirée, on imagine lui parler et puis on ne le fait jamais vraiment.” »
La journaliste explique qu’avoir un crush reviendrait à « faire marcher la machine à fantasmes ». Et j’aime plutôt bien cette idée.
Quand je croise mon crush du Monoprix, je m’imagine souvent une scène de film. On se rentrerait dedans, ma boîte de Tempax tomberait. On en rigolerait et il me proposerait d’aller boire un verre de vin. Avec le voisin c’est pareil. Pourquoi est-ce que je ne pourrais pas vivre une histoire à la Sex List où Monsieur Ecole de Commerce aurait le rôle de Chris Evans, et on chillerait tous les deux, en parlant de la vie, avant de faire l’amour. Idem avec mon crush du lycée ou celui de la fac, pourquoi des années plus tard, on ne se retrouverait pas pour filer le parfait amour ?
Est-ce que ce coup de coeur doit forcément donner lieu à quelque chose ? J’ai tenté le coup, avec un crush de bureau. Le résultat n’était pas à la hauteur de mes attentes, le scénario que l’on s’invente, n’est pas toujours fidèle à la production originale.
Au final, je trouve que le crush, c’est un peu le Netflix de la vraie vie. La romance du dimanche soir. Le feuilleton préféré des coeurs d’artichauts. Ça fait passer le temps, ça rend l’hiver moins froid, ça met du piment dans certaines soirées. En fin de compte, est-ce que j’ai réellement envie de vivre une idylle avec tous ces hommes dont je ne sais presque rien, si ce n’est qu’ils m’attirent physiquement ? Je ne crois pas. Je crois que je préfère vivre ces histoires dans ma tête, savourez les papillons éphémères, qui m’auront fait sourire et minauder. Et garder cette image comme une douce parenthèse au milieu de la réalité.
Bisous,
Lauréna
Je te mets le lien de l’article de Léa Nicosi sur les crushs, juste ici : https://www.huffingtonpost.fr/entry/ce-que-le-terme-crush-nous-apprend-de-lamour-en-2020_fr_5dc3e43ee4b03ddc02ef82fd
Si tu veux imaginer une vie d’amour et d’eau fraîche avec ton crush, tu peux enfiler tes AirPods et écouter « Teenager » de Silly Boy Blue (et tout son album « Breakup Songs ») c’est typiquement le genre de chanson qui fait divaguer mon imagination sur mes love interest.
Ho, ça me rappelle quelqu’un, dans les années 80…😃😉 belle écriture. Ton fan.